Johann Schneider-Ammann joue la transparence. Dans l’éditorial de La Vie économique, le magazine d’information publié par son département, il affirme que le Conseil fédéral doit fermement s’engager en faveur d’une réglementation internationale sur l’approvisionnement en matières premières. Cette recommandation va pile à la rencontre des conclusions du séminaire organisé en juin passé par l’Association des constructeurs de machines. Swissmem, rappelons-le, était alors présidée par le patron de l’entreprise Ammann! On ne parle bien que de ce que l’on connaît.
L’éditorial du nouveau conseiller fédéral traite du marché des métaux rares et ne fait aucune allusion à l’évolution chaotique de celui des céréales, du lait ou autres produits agricoles (DP 1873). Mais les paysans sauront rapidement le mettre au parfum. Bien qu’étroitement ciblées, les préoccupations de J. Schneider-Ammann sont légitimes. Le marché des matières premières minérales ne soulève pas les passions, comme celui du pétrole. Mais les mêmes causes entraînent les mêmes effets. La vigoureuse croissance de la Chine, de l’Inde et autres pays émergents gonfle la demande. L’offre ne suit pas et les ressources s’épuisent.
L’Union européenne vient de publier un rapport sur les matières premières. Cette étude soulève le danger de la raréfaction d’une vingtaine de minéraux dont certains sont indispensables au développement des nouvelles technologies. Le risque de pénurie est le plus grand pour les «terres rares» nécessaires à la fabrication des ampoules à basse consommation ou des batteries pour voitures électriques. Le monde industriel pourrait également manquer de toute une série de métaux, notamment le niobium, nécessaires à la transformation de l’acier.
L’approvisionnement pourrait faire défaut par épuisement des gisements mais aussi par la centralisation des lieux d’extraction. Pour exemple, l’Union européenne importe de Chine 90% des «terres rares» nécessaires à son industrie. La même dépendance massive existe pour le niobium extrait quasi exclusivement des gisements du Brésil.
Un commerce aussi délicat et lourd de menaces ne peut être confié sans autre à la main invisible du marché. L’Allemagne a créé une Agence des matières premières pour assurer le dialogue avec ses entreprises industrielles. L’Union européenne met en consultation auprès de ses membres une stratégie communautaire. Mais le problème ne peut être réglé qu’au niveau mondial, à l’OMC. La politique de Johan Schneider-Ammann pour réglementer le commerce des matières premières est toute tracée. S’accrocher à l’UE pour défendre les intérêts suisses dans la vaste négociation planétaire qui s’ouvrira tôt ou tard.
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