
Le durcissement de la loi sur l’asile continue à un rythme soutenu. Deux ans après l’entrée en vigueur de la réforme de Christoph Blocher, le Conseil fédéral approuve celle d’Eveline Widmer-Schlumpf.
C’est l’exacte copie du projet mis en consultation. Malgré les objections véhémentes formulées par les défenseurs des requérants d’asile, le délai de recours contre une décision de renvoi est réduit à 15 jours, les représentants d’œuvres d’entraide ne pourront plus assister aux interrogatoires. De plus, une demande ne pourra plus être déposée dans une ambassade. Enfin, l’objection de conscience et le refus de servir dans une armée ne seront plus reconnus comme motifs valables pour obtenir l’asile.
Ce nouveau tour de vis ne suffit cependant pas à l’UDC, qui exige la rigueur contre les requérants déboutés. Une étude réalisée à la demande de l’ODM, l’Office fédéral de migrations, montre que malgré toutes les mesures décidées à ce jour une décision de renvoi ne signifie pas que le requérant à qui l’asile a été définitivement refusé quittera spontanément la Suisse. Dans certains cas, c’est d’ailleurs son pays qui refuse de le reprendre, lui déniant sa nationalité. Pour faire partir les récalcitrants, la réforme Blocher supprimait l’aide sociale aux déboutés. Mais la Constitution fédérale impose de venir en aide à toute personne en situation de détresse. Les cantons leur accordent donc une aide d’urgence de 8 francs par jour.
Ce régime de disette n’a pas eu l’effet dissuasif escompté. Et même loin de là. La situation varie fortement d’un canton à l’autre. Vaud est le plus permissif. Deux ans après une décision de renvoi, près de 70% des ex-requérants résidaient toujours dans le canton. Plus significatif encore, près de 40% des déboutés étaient encore présents quatre ans après notification du renvoi. La situation est à peu près semblable à Zurich, Bâle et Genève suivis, d’un peu plus loin, par Fribourg et Neuchâtel. Les petits cantons alémaniques, le Tessin et les Grisons sont, à l’inverse, nettement plus zélés. Mais partout, il reste un pourcentage incompressible, quelque 10%, qu’on ne peut expulser.
Les différences cantonales proviennent, pour beaucoup, de facteurs structurels. Dans les grandes villes, les requérants déboutés parviennent à se débrouiller. Ils peuvent échapper à la vigilance des autorités, trouver de l’aide de compatriotes, décrocher des travaux clandestins ou rejoindre une filière de la drogue.
Mais l’étude commandée par l’ODM relève également qu’un soutien des organisations d’entraide peut freiner les départs. Cette dernière remarque fait bondir Hans Fehr. Interrogé par le Tages-Anzeiger, le conseiller national UDC demande que l’on inflige des amendes aux organisations qui entendent venir en aide à ceux qui ne s’en sortent pas avec 8 francs par jour. Il n’y a pas de limite à l’escalade de la rigueur. On pourrait, par exemple, suivre l’exemple de Silvio Berlusconi qui peut renvoyer les migrants vers la Libye, pays qui n’est pas un champion du respect des droits de l’homme.
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