L’Union démocratique du centre a profité aux socialistes. La gauche a gagné à la fois contre l’UDC et grâce à sa présence au deuxième tour du scrutin. Les succès des nationalistes ont su mobiliser les électeurs de gauche. Les divisions dans le camp bourgeois, exaspérées par le parti de Blocher, ont permis au parti socialiste de rentabiliser pleinement son unité. C’est frappant dans les cantons de Vaud et Neuchâtel où la présence d’un UDC a précipité la déroute des candidats de la droite modérée. A Schwyz, les radicaux disparaissent des Chambres fédérales au profit d’un démocrate du centre. A Fribourg les socialistes font le malheur des radicaux trop empressés de soutenir la candidature de Christoph Blocher menaçant ainsi les deux conseillers fédéraux PDC.
L’UDC cherche la confrontation. Elle vise la polarisation de la politique suisse. Il s’agit pour elle d’achever l’OPA sur la droite en absorbant tôt ou tard les franges voisines des partis radical et démocrate-chrétien.
Dans cette optique, l’importance symbolique de l’élection du Conseil fédéral le 10 décembre prochain ainsi que l’agitation politico-médiatique qui l’accompagne ne doit pas occulter le dessin à plus long terme de fonder une grande formation conservatrice. Celle-ci serait fermement ancrée dans l’économie du pays, cimentée par une base urbaine forte avec des attaches solides dans le monde paysan, sans oublier le soutien, peut-être plus versatile mais décisif, des milieux populaires sensibles aux invectives adressées au monde fermé du Palais fédéral. Bref, un parti cousin d’Alleanza nazionale de Gianfranco Fini en Italie ou de la CSU Bavaroise en Allemagne du temps de Franz-Josef Strauss. Les rapprochements avec Le Pen en France et Haider en Autriche semblent moins pertinents malgré le populisme et la xénophobie manifestes. Ils ne disent pas tout et risquent de compromettre la compréhension du changement en cours.
Les rapports de force bougent. Ils deviennent paradoxalement plus fluides et plus rigides en même temps. En quelques années, la belle concordance helvétique pourrait devoir composer avec deux blocs antagonistes pris dans le corset du système politique suisse (cf. DP n°1579). D’un côté, on aurait une droite enfin rassemblée aux ordres de l’UDC. De l’autre, on verrait une gauche qui ne pourrait plus spéculer sur la désunion de l’adversaire, et qui devrait compter avec un parti écologiste en expansion et une extrême gauche revitalisée par l’affrontement avec la droite.
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