Christian Levrat, le président du parti socialiste suisse, et une majorité de son groupe parlementaire manifestent une préférence marquée pour le candidat démocrate-chrétien Urs Schwaller. Quand bien même ce dernier, comme on pouvait s’y attendre, a clairement refusé de se positionner plus à gauche en échange du soutien socialiste. Dès lors on peine à comprendre le jeu des enchères auquel se livrent les socialistes.
Certes la personnalité des candidats et leurs options ne sont pas négligeables. Encore faut-il regarder de près pour détecter les nuances politiques qui distinguent le radical neuchâtelois du démocrate-chrétien fribourgeois.
L’enjeu premier de cette élection complémentaire est ailleurs. C’est de la sauvegarde de la concordance comme principe de gouvernement qu’il s’agit (cf. DP 1806). Or de concordance, il n’en est guère question dans cette campagne. Rien ne justifie de modifier la composition politique du Conseil fédéral à l’occasion de cette élection complémentaire. Ni une modification significative du rapport des forces, ni un retournement soudain du parti radical qui, à l’exemple de l’UDC, se serait mis à pratiquer une opposition systématique l’excluant dès lors de la gestion exécutive. L’équilibre des forces devrait donc conduire à élire un (libéral-)radical.
On peut comprendre le désir démocrate-chrétien de retrouver son deuxième siège. Mais l’échec du PDC en 2003 – Ruth Metzler fut alors éjectée du Conseil fédéral – incombe aux démocrates-chrétiens eux-mêmes dont certains députés n’ont pas hésité alors à donner leur voix à Christoph Blocher. S’ils veulent réparer cette erreur, c’est à l’UDC qu’ils devront s’attaquer en 2011.
On peut également comprendre la tentation socialiste de soutenir un candidat quelque peu plus social que son concurrent radical. Mais succomber à cette tentation risque de coûter cher à terme. Si la composition politique du Conseil fédéral résulte à l’avenir de telles considérations, le principe de convenance se substituera à celui de la concordance. A ce jeu, les socialistes ne peuvent que perdre. Surtout on voit mal comment pourrait fonctionner un gouvernement issu d’une telle noce à Thomas : c’est précisément la concordance qui permet au Conseil fédéral de gouverner, privé qu’il est d’une majorité parlementaire automatique et soumis au contrôle incessant du peuple.
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