Une élection au Conseil fédéral, c’est l’assurance que les médias auront du grain à moudre. Deux partis pour un siège, mais pas n’importe quels groupuscules, deux partis historiques, les radicaux fondateurs de la Suisse moderne et les perdants du Sonderbund, progressivement réintégrés dans l’exercice du pouvoir fédéral.
En 1919, après l’élection du Conseil national à la proportionnelle, les radicaux tiennent 5 sièges sur 7, les conservateurs-catholiques 2. En 1929, les radicaux passent à 4, cédant un siège aux agrariens (futurs UDC). En 1943, ils se retrouvent 3, un siège passe aux socialistes. En 1959, ils sont réduits à 2. C’est la formule magique: deux radicaux, deux conservateurs, deux socialistes, un agrarien. Elle tiendra presque un demi-siècle. Aujourd’hui l’affrontement oppose les deux partenaires du début du siècle passé et les radicaux qui menaient 5 à 2 sont menacés d’un 1 à 2. Historique certes, spectaculaire. Et pourtant l’enjeu n’a rien d’épique. Plutôt boutiquier.
L’UDC et son allié
La formule magique est morte sous la poussée de l’UDC. En 2003, la droite parlementaire réussit à prendre le pouvoir en faisant élire non seulement Blocher, mais aussi Merz. Le PDC perd le siège de Ruth Metzler avec la complicité (la trahison) de quelques-uns des siens. Ce parti est ramené à un seul représentant. Il parle dès lors de revanche.
L’erreur stratégique de 2007
En 2007, la majorité du Parlement désire ne pas réélire Blocher qui s’est révélé non soluble dans la collégialité. Le PDC avait l’occasion de récupérer son siège en opposant frontalement à Blocher un adversaire (Urs Schwaller) et en défendant quelques thèmes simples (ouverture de la Suisse, consolidation de la politique sociale). Au nom du respect de la proportionnelle, on a préféré élire un(e) UDC contre le choix de son parti.
La reconquête du deuxième siège, qui aurait pu être un acte politique fort, a été abandonnée au profit d’une manœuvre dont le seul mérite était l’éviction de Blocher.
Deux zéros après la virgule
La revendication PDC tombe en pleine législature sans que le peuple ait par les élections donné une orientation. Faute de faits nouveaux, elle est fondée sur l’importance numérique du groupe parlementaire PDC qui serait supérieur en pourcentage à celui des radicaux. La composition du gouvernement se calculerait au centième. Cette arithmétique ne convainc personne.
Déclaration de principes
Puisque la revendication d’un deuxième siège au Conseil fédéral émane du PDC, il lui appartient de la justifier par une déclaration publique précisant en quoi et sur quels points il ferait sinon mieux du moins autrement que son concurrent radical. Il est tenu de répondre à la question simple: pour quoi plus de pouvoir? On peut s’attendre à des promesses écologiques, c’est bon à prendre. Sans surprise encore, des bercements en faveur de la famille, Colin mon p’tit frère appréciera. Mais plus décisif sera le positionnement à l’égard de l’UDC dont le droit à deux sièges au Conseil fédéral est contestable. Car ce parti hostile à l’Europe, méfiant à l’égard de l’étranger, s’opposant à la consolidation de la politique sociale, ne peut être associé aux responsabilités gouvernementales. Il ne saurait y avoir une nouvelle formule magique englobant l’UDC.
A défaut d’une telle affirmation politique forte, l’élection complémentaire se ferait dans les couloirs, les rabatteurs pointeraient chaque voix, une seule pouvant faire la différence – et, dans ce cas de figure, Zisyadis composerait le Conseil fédéral.
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