Impressum, l’association des journalistes de la presse écrite et le Syndicat suisse des mass media publient en commun le premier numéro d’un magazine consacré aux médias. Edito, c’est le nom de la nouvelle publication bimestrielle, remplace Journalistes.ch et La gazette SSM. Au-delà d’une simple fusion de titres, nous assistons à un rapprochement entre les deux grandes associations, signe que les temps sont durs pour ceux qui travaillent dans les médias. Le syndicat Comedia, largement minoritaire chez les journalistes, affiche toujours sa démarche indépendante. Le premier numéro de Edito, fort différent des deux titres qu’il remplace, laisse apparaître les nouvelles tendances de la défense professionnelle commune.
Premier indice: le choix de Christian Campiche comme rédacteur en chef de la version française. Avec un groupe de journalistes, il est fondateur du blog Infoendanger.net qui répertorie et condamne les dérapages des médias. La dureté des temps peut frapper les journalistes dans leurs intérêts matériels. Mais elle peut aussi les inciter à être plus sensibles aux intérêts commerciaux de leur média qu’au respect de l’éthique de la profession.
Deuxième indice: le magazine donne la parole à dix rédacteurs en chef des médias écrits et audiovisuels de Suisse romande et du Tessin sur ce qu’ils attendent de Edito. Mais pas un responsable d’un titre d’Edipresse ou de Ringier ne s’exprime. Comme interpréter cette absence remarquable?
Pour le reste, le contenu des articles donne le ton. Les papiers consacrés à la vie interne des associations ne représentent que trois ou quatre pages sur 48. Pour l’essentiel, le magazine décrit et commente le paysage médiatique «labouré par la crise». Les difficultés économiques conduisent la Suisse vers une «presse plus tapageuse au contenu allégé». Dans la presse écrite, ne subsisteront bientôt que trois groupes: Tamedia, Ringier et NZZ. Un papier, particulièrement critique sur la tendance autoritaire et centralisatrice de la direction de Tamedia, prédit le déclin de la diversité de l’information. Avec la reprise d’Edipresse par le groupe zurichois la Suisse romande ne serait pas épargnée. L’indépendance du quotidien Le Temps pourrait aussi être menacée. Ringier serait tenté de se débarrasser de sa forte participation dans le quotidien, plutôt que d’accepter une gestion partagée avec son grand concurrent. Plus nuancé, Roger Blum, professeur à l’Université de Berne, estime que Tamedia devrait avoir la clairvoyance d’adapter ses titres aux sensibilités régionales et cantonales.
La SSR ne fait pas exception au mouvement de concentration. Edito considère pour acquise la fusion, en Suisse romande, des rédactions de la Radio et de la Télévision. Comme la direction générale du nouveau groupe ira certainement à Gilles Marchand, le poste de directeur de l’information pourrait revenir à Patrick Nussbaum.
Les papiers de Edito, rédigés aussi bien par des Romands que des Alémaniques, semblent solides. Les gens du sérail sont souvent bien informés. Mais, défenseur de l’éthique professionnelle, le nouveau magazine devrait être attentif aux dangers de la proximité. Un article sur le déclin d’Edipresse, rédigé par un ancien journaliste de la maison, décrit les mérites et les méfaits des différents cadres du groupe avec un manichéisme un peu suspect.
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Le magazine Edito peut être obtenu par abonnement: abo@edito-online.ch ou p.a. bachmann medien, Thiersteinerallee 17, 4053 Basel
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